Juin 2007 à Goundi

Publié le par Sandrine et François

Tournée des écoles

Il n’a pas fallu longtemps pour convaincre Prosper Beotombaye – celui de l’hôpital – de nous emmener à l’école de son village, en brousse. Il avait envie de prendre l’air lui aussi. Il nous propose même mieux : faire le tour des écoles de Gangara avec « Patcha » (Patchalangar en fait), le conseiller pédagogique de la circonscription de Gangara, au sud de Goundi. Il sera notre guide. Ainsi tout le monde s’y retrouve : Patcha fait sa tournée des écoles en voiture au lieu de la faire en vélo, Prosper va suivre un peu les différents projets des écoles auxquels il participe, rendant par la même occasion visite à ses amis et à sa famille, et nous on ne demande pas mieux que de voir du pays et découvrir les écoles de brousse.

Jeudi 24 mai, de 7h30 à 13h, nous ne verrons pas moins de dix écoles – Boudobo, Kidirte, Gangara, Koumaï, Kaga, Mondibate, Koumbote, Kapoyo, Kitepobo et Goli –, une cinquantaine de maîtres (dont une femme) et surtout des centaines et des centaines de gamins !

 

Les écoles les plus modestes ne sont constituées que d’un « hangar », composé de tiges de mil et qu’il faut refaire chaque année. Les élèves sont assis sur des rondins de bois, il y a parfois des tables. Parfois ils s’assoient à même le sol. Les écoles de Gangara, Koumaï et Kaga ont des bâtiments en briques, travaux financés par l’état (Gangara), par des ONG (Worldvision, Koumaï) ou par des particuliers (Kaga, village natal de Prosper). Seule l’école de Kaga à l’électricité grâce à des panneaux solaires. Nulle part les élèves ne disposent de manuels de lecture ou de calcul, seuls les maîtres en possèdent un exemplaire (et encore ce n’est pas le cas partout). Certaines classes sont effrayantes : à Kaga il y a 184 élèves en CP. Les classes les plus jeunes sont les plus chargées, avec une moitié de filles, puis les effectifs diminuent jusqu’au CM2, la proportion de filles diminuant nettement avec l’âge.

 

Partout nous sommes bien accueillis. Certaines classes nous réservent un chant d’accueil. On nous offre à boire à Kaga. Nous repartirons avec  un poulet de Katepobo puis de Goli. Passage obligé pour les étrangers que nous sommes, nous finirons notre tournée chez le sous-préfet de Gangara qui se serait fâché si on avait refusé l’invitation. Au menu : du poulet. Finalement, à table, la discussion est sympa. Nous parlons de politique, de la France, du Tchad et d’immigration choisie. Prosper connaissait le sous-préfet alors qu’il était simple gendarme. Ils ont milité ensemble à Justice et Paix.

 

Arrivés à la maison à 15h, nous nous écroulons sur le lit, contents de notre journée.

 

 

Fin d’année scolaire perturbée

Vendredi dernier avait lieu le concours d’entrée en 6ième. Jusqu’au matin même, personne ne savait  s’il aurait lieu. En effet les fonctionnaires tchadiens sont en grève depuis plus d’un mois, et quelques jours avant le concours ils parlaient de durcir leur mouvement. Finalement tout s’est bien passé à Goundi, les syndicats étaient là, quelques gendarmes, mais pas de soucis. Le bac a commencé mardi, on ne sait pas pour le moment comment ça se déroule et si dans tout le pays tout le monde a pu commencer.

 

A Maïmba, les cours sont l’après-midi. Et ce n’est vraiment pas terrible. Les élèves sont fatigués de leurs travaux du matin, énervés, les maîtres ne sont plus motivés, arrivant avec parfois une heure de retard (« j’étais à table », « il y a des étrangers chez moi »), prétextant parfois des excuses bidons pour ne pas venir…  Et puis la pluie nous a joué un mauvais tour. Elle s’est arrêtée pendant quinze jours. Du coup on ne sait pas s’il va pleuvoir le lendemain ou pas, s’il faut semer ou pas… Tout le monde attend, ne pense qu’à ça… Ceux qui ont semé trop tôt, comme les élèves de Maïmba, ont perdu leurs semences. Il faudra recommencer. Nous sommes dépendant des caprices de la météo. Ici plus qu’ailleurs on se rend compte que l’eau, c’est la vie. Et qu’un retard de la pluie peut être catastrophique. On dit que c’est Dieu qui décide.

 

Mais heureusement, il pleut abondamment depuis dimanche. Cette fois l’école est bien terminée. Faute de pouvoir voyager dans le Tchad, libérés des cours, nous découvrons un autre aspect de la vie à Goundi : les travaux des champs. Nous voyons davantage les éducateurs de Maïmba. Chaque matin nous faisons notre petit tour aux champs pour voir si tout se passe bien. C’est un grand plaisir à chaque fois. Les contacts avec les élèves sont plus sympas dans les champs que dans les classes. Les éducateurs nous expliquent leur programme de la journée, on échange quelques mots, ainsi on se tient au courant de ce qui se passe au centre.

 

 

Evariste (2)

Depuis qu’il a décidé de quitter Maïmba, Evariste n’en finit plus de partir… Laissant sa femme Alice et ses sept enfants à Maïmba, il est parti il y a un mois dans son village de Nderguigui, à 42 km d’ici, afin de revenir avec une charrette pour le déménagement de Goundi vers le village. Mais les journées passent et nous n’avons plus de nouvelles de lui. Que fait-il ? Certains disent qu’il est en train de cultiver dans son village, d’autres pensent qu’il enverra un de ses frères pour ramener sa famille… Pas de nouvelles. Nous faisons une réunion pour décider  de son remplacement. Nous attendons que Raphaël accepte d’emménager dans la maison d’Evariste. C’est compliqué car il faut aussi convaincre sa femme, qui laisserait sa maison et prendrait le rôle d’Alice qui s’occupait des filles. Nous refaisons une réunion exprès pour cela. Certains se moquent : Si le mari prend une décision, sa femme ne doit-elle pas suivre ? Raphaël aurait-il peur de sa femme ? Les choses avancent dans le bon sens mais il y a encore des obstacles. Bruno, l’éducateur des CE1, et par la même occasion le père d’Alice, est inquiet. Sa fille est toute seule dans la maison et il veut qu’elle vienne dormir chez lui. En l’absence du mari c’est le père qui s’occupe de la fille. Certains maîtres ou éducateurs disent que ce n’est pas normal, Alice est mariée elle ne doit pas aller vivre chez son père, qui plus est sans l’accord de son mari ! Ça devient compliqué. Et Evariste qui ne revient toujours pas… Et puis Raphaël ne veut pas emménager chez Evariste tant que ce dernier n’est pas revenu. Ça créerait des histoires. Mais entre-temps il n’y a toujours personne à côté des filles.

 

Finalement Evariste est arrivé mardi de Ndjamena. Il a la charrette mais il lui manque un bœuf, qu’il trouvera à Goundi. Sa famille a pris la direction du village hier soir à 19 heures. Il y a huit heures de marche, ils auront donc voyagé de nuit. Ce matin Evariste était toujours à Maïmba…

Victor, un enfant d'Evariste:


Quelques impressions pour finir...

Nous terminons l’année avec un mélange de plusieurs impressions : nous sommes frustrés de ne pas pouvoir voyager dans le Tchad, pourtant nous profitons de Goundi. Nous attendons impatiemment les vacances en France, nous aimerions partir le plus tôt possible à Ndjamena histoire de se promener un peu, mais nous voulons encore faire quelques petites choses ici. Nous sommes fatigués, on s’ennuie parfois un peu, mais nous sommes contents d’avoir réussi notre première année à Goundi.

 

 

Publié dans sandrine-et-francois

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L
toujours un véritable bonheur de vous lire...<br /> Merci!! et à très bientôt en France.<br /> léo, anthony
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