mai 2008 à Goundi

Publié le par Sandrine et François

Le Tchad est d’abord une expérience physique

Cette année, il n’a pas fait trop chaud, rarement plus de 37° dans la maison. Rien de trop excessif en somme, vu le climat local. Il n’y a guère que le jour de Pâques où nous avons vraiment été « scotchés » par la chaleur. Les premières pluies sont vite venues. Quelques petites gouttelettes en mars, et des petites pluies en avril. Dans notre tête, les grosses chaleurs étaient passées. Mais aujourd’hui, ça fait déjà deux semaines qu’il n’a pas plu. Il fait vraiment très très chaud. Dès le matin, ça nous coûte de rester debout. Psychologiquement, c’est difficile car on croyait qu’on avait fait le plus dur et on doit encore lutter ! Il n’y a qu’à la nuit tombée qu’on souffle un peu, à traîner et sous les étoiles, magnifiques en ce moment. Comme le dit Justine, une autre volontaire DCC à N’Djamena et passée par Goundi, dans son dernier courrier, le Tchad est d’abord une expérience physique ! Tout ça ne nous empêche pas de faire du vélo, quelques fois jusqu’à Mamyong là-bas dans la brousse, et de nous balader à pieds, de continuer la construction de notre poulailler (il ne reste plus que le toit à faire, en feuilles de rônier)…

 

En France, on entend souvent dire que les Africains sont un peu fainéants, voire carrément paresseux. Il faut venir à Mamyong alors. En ce moment la pompe est cassée, et il faut puiser l’eau à la main, remonter le puisoir à plus de vingt mètres (ce qui n’est pas beaucoup ici) plusieurs fois par jour. L’autre jour, nous avons rempli la cuve pour le groupe électrogène avec les élèves de 6ème : 400 litres remontés à la main entre 10h et midi. Au début, c’est marrant. Au bout de cinq ou six seaux, ça commence à tirer sur les bras et on s’économise. A dix seaux on sait déjà qu’on sera bon pour des courbatures le lendemain. Le Tchad est une aventure physique !

 

Souffrances partagées

Nous pensons à Pascal, un jeune français volontaires de l’ONG Save the Children, assassiné par des coupeurs de route, dans l’Est du pays, et à sa famille. Nous voulons vous rassurer, l’atmosphère est plus calme dans le Sud du pays. A Goundi rien ne nous empêche de circuler librement, les gestes d’hostilité à notre égard sont rares, c’est même le contraire. Rien ne nous empêche de faire notre travail. Nous savons que beaucoup de choses, qui nous dépassent, se passent. Les quelques informations qui tombent parfois dans nos oreilles en disent long sur l’état d’esprit des gens actuellement. Un proverbe ici dit que pour être heureux, il ne faut rien voir, rien dire, rien entendre. Ceux qui réussissent, qui ont trop d’argent, trop d’influence, sont souvent menacés.

                       

Difficultés de toutes sortes, au travail, souffrances partagées avec les Tchadiens, nous sommes comme des éponges qui absorbent tous les jours les mille frustrations du quotidien. Par bonheur, nous avons retrouvé samedi dernier notre ami Esteban à Koumra. Après quelques bières, sucreries, viande grillée, il nous a permis de partager nos questions. Il nous a une nouvelle fois partagé  son expérience au Rwanda-Congo dans les années 90, conflit qui n’est malheureusement pas terminé. Il nous a parlé de sa tristesse de voir qu’en Europe, pour la plupart des gens, vivre pour les autres n’a plus de sens. Pourtant nous sommes bien tous dans le même bateau. Quand comprendra-t-on que ce qu’il se passe de ce côté de la planète nous concerne tous ?

 

Voyages

Les voyages ne sont pas une mince affaire dans ce pays, et il faut une certaine dose de courage pour s’aventurer sur les pistes tchadiennes. Nous avons de l’admiration pour tous les Tchadiens qui voyagent sur les toits des camions, hommes, femmes, vieux, enfants, bébés sur le dos de leur maman, qui doivent affronter les secousses de la route, la poussière, le soleil, les heures d’attente interminables, n’emportant la plupart du temps qu’un petit sac pour plusieurs jours de voyage. Quand nous sommes rentrés de Koumra, nous avons ramené Barthélemy. Nous avons attaché sa moto debout sur le plateau de la voiture, et lui, devinez, il s’est assis dessus pendant tout le trajet ! Sur l’une des routes les plus chaotiques du pays, soixante km de bosses et de trous…  Autre exemple : quand nous ramenons un élève de Mamyong à Goundi, pour qu’il passe la nuit à Maïmba, la plupart du temps, il n’emmène rien : ni brosse à dent, ni slip de rechange !

 

Le premier mai, nous étions tranquillement avec Roberto en train d’échanger de la musique, quand des enfants nous ont apporté un tout petit singe : malheureusement, je n’avais pas mon appareil ! Nous faisons des progrès en italien : nous avons pu suivre un film entièrement dans cette langue : « Ogni cosa e illuminata » (« everything is illuminated », je ne connais pas le titre en français). Un film magnifique, un des plus beaux que nous avons vu depuis longtemps… Nous mangeons parfois italien : bruschetta, gnocchi, caffè… Beaucoup de choses très bonnes faites avec les ingrédients locaux, mais pas forcément appréciées par les Tchadiens. Comme quoi les goûts et les couleurs ! Cette semaine, Roberto est rentré en Italie, nous avons promis de nous revoir. Avec Ignacio et Luz, les Argentins de l’année dernière, Enry la Catalane et bien d’autres, on va être obligé de prendre une année sabbatique pour faire le tour de tous nos amis rencontrés à Goundi ! En attendant, nous faisons un peu plus d’effort pour parler italien avec Barbara, qui se sent maintenant un peu perdue au milieu de ces quatre français, Emilio étant parti faire un tour à la capitale. Un Italien en chassant un autre, Fabio un jeune médecin italien devrait arriver ce week-end à Goundi.

 

Culture sara

Barbara a beaucoup d’idées pour les activités artistiques à Maïmba (théâtre, peinture, jeux…), heureusement car ce n’est pas toujours évident de faire avec les moyens du bord. Par exemple, elle a remarqué qu’il y a du kaolin en brousse, une terre rouge parfaite. Ce qu’elle ne pouvait pas deviner, c’est qu’au moment venu, les garçons ne voulaient pas faire, et l’activité est  tombée à l’eau. Explication des collègues par la suite : les derniers initiés n’ont pas le droit de toucher au kaolin, c’est un interdit important. Comment pouvait-on le savoir ? Ils auront le droit de toucher à cette couleur rouge, un des symboles de l’Afrique, à la prochaine initiation, c’est-à-dire dans sept ou dix ans. Mais auront-ils encore envie de faire des dessins ?

 

Nous souhaitons aller la fête du Roi des Saras, à Bédaya. Cette fête, très importante, elle célèbre la culture sara. Pour l’instant, personne ne connaît la date : tout le monde se prépare, et quand le Roi, le « Mbang », juge que c’est prêt, il arrête une date. C’est Abel, notre voisin originaire de Bedaya qui doit nous prévenir. En attendant, nous retournons nous occuper de  nos enfants et de nos bœufs de Maïmba !

 

 

 

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Y
salut sandrine te farnçois j'espere que vous allez bien,juste un petit mot pour vous dire que dans un mois je vous rejoins au tchad(Forchana)dans l'est du pays .avec un peu de chance je passerai par chez vous .a bientot yann
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A
Bonjour vous deux! Merci encore pour toutes vos nouvelles! Le mois de mai ets aussi un soulagement en Pologne... mais parce que le soleil arrive enfin pour de bon! (à Pâques, il neigeait...)Bon courage à vous deux pour les dernières grosses chaleurs!Amandine
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