troubles à N'Djamena (2)
Mercredi 6 février
Troubles à N’Djamena (2)
Dimanche dernier, nous avons regardé les quarts de final de la CAN chez Prosper, au moment des infos, il y avait une certaine gêne à être Français ce soir-là : à la télé on ne parlait que des Français et de leur évacuation de la ville. Mais les Tchadiens ? Nous voyons les images de la capitale : les soldats, les armes, les chars, les dégâts… c’est affreux. Affreux, affreux, affreux… Ici tout le monde a de la famille de N’Djamena, et s’inquiète beaucoup.
Pour l’instant seuls les Français de la capitale sont concernés par les rapatriements, mais on ne sait jamais. On nous dit de faire nos valises…
Lundi matin, nous allons au travail mais le cœur n’y est pas vraiment. Prosper dit que l’histoire se répète, qu’on tourne en rond. Alexis est très sombre : « le Tchad est réduit à zéro ». L’expression qui revient le plus : « ça ne va pas du tout ». Louis : « il ne fait pas bon vivre ici ». Roger n’allume même plus la radio : « trop de mauvaises nouvelles, ça rend malade ».
Vu d’ici l’issue des combats est presque secondaire. On dirait que peu importe qui prend ou garde le pouvoir. L’urgence est que les armes se taisent. On craint toujours le pire. Comme en 1979 par exemple. Des souvenirs reviennent. Alexis nous raconte les années 80 qui ont été terribles, personne n’a envie de revivre ça.
Le soir, à l’étude, les jeunes sont plus remontés que leurs aînés : ils crient qu’ils en ont marre. Certains ont peur que la guerre ne vienne jusqu’ici.
Vraiment la journée de lundi a été très triste.
Mardi l’atmosphère se détend. Les combats ont cessé dans N’Djamena. On apprend que nos amis de la Dcc sont à Paris. Marianne, coincée à l’hôpital, a été « exfiltrée » par l’armée française. Ouf ! On s’était beaucoup inquiété pour elle et pour ceux qui étaient restés dans l’hôpital, qui paraît-il, a été touché.
L’orage est passé. On défait les valises à midi. On respire. A suivre.
De l’avis de tous, le Tchad vient encore de faire un pas en arrière. Mais la vie continue.